Flattr, créé par Sunde et Linus Olsson en mars 2010, ouvre la voie. Similaire au bouton “like” de Facebook, Flattr permets à ses utilisateurs de donner une somme d’argent de leur choix aux sites web qui sont membres. Chaque mois, les utilisateurs paient Flattr un minimum de 2€. Ils peuvent “flatter” autant de sites Internet qu’ils le souhaitent et en fin de mois, les 2€ (ou 20€ ou 50€…) sont divisés entre les sites qui ont été cliqués, auxquels on sosutrait 10% de frais. Les utilisateurs peuvent aussi ajouter le bouton Flattr sur leur site.
Le processus est simple, ne requiert qu’un minimum de connaissances techniques et empêche les abonnés de dépenser plus que la somme qu’ils ont prévue. Owni.fr a rencontré Peter Sunde à Bombay, où il assistait à une conférence sur l’archivage, pour lui parler des ses derniers projets et de ses expériences passées.
L’idée avec Flattr, c’est de créer un système simple d’utilisation pour que les gens puissent partager de l’argent sur Internet, dans un contexte d’abondance de l’information. On ne peut pas vraiment payer pour tout et ce serait même trop pénible de devoir payer pour tout. Flattr est un système particulier. Nous ne croyons pas que ce soit le système adéquat pour payer pour tout – on a besoin de plusieurs systèmes.
Prenez la Croix Rouge. C’est l’une des plus grandes organisations dans le monde. Ils ont des milliers et des milliers d’employés et ils reçoivent de l’argent. Pour nous, il est clair que les gens sont prêt à donner, c’est juste difficile et compliqué pour eux de le faire.
Les gens ont aussi besoin de culture. La culture est un élément tellement important dans la vie de tout les jours que les gens sont vraiment partant pour payer. Ou pour filer un coup de main plutôt que simplement payer. Ils veulent rémunérer les gens pour ce qu’ils créent.
Nous avons 70.000 utilisateurs, dont 30% sont des créateurs qui veulent se faire “flatter”. Mais ils doivent aussi dépenser de l’argent. C’est un système égalitaire dans lequel tout le monde doit s’engager et s’investir. Beaucoup de nos membres sont allemands. Les blogs politiques, les podcasts et les médias sont ceux qui se font le plus d’argent. Nous nous sommes rendu compte un jour que deux journaux allemands s’étaient inscrit sur Flattr à juste un jour d’intervalle. Mais ce n’est pas qu’une question d’argent. Il s’agit aussi pour eux de diffuser leurs articles parce Flattr, qui est un mélange de StumbleUpon, du bouton “like” de Facebook et de PayPal, permet de découvrir des nouvelles choses.
Payer nécessite avoir de l’argent ou prendre un crédit. Utiliser Flattr, c’est plus un acte volontaire. C’est davantage un encouragement, ou éventuellement un don. Ca montre aussi une certaine forme de soutien social. Si vous avez 400 “like” sur Facebook, cela veut seulement dire que 400 personnes ont cliqué sur un bouton. Mais avoir 400 “flatteurs” signifie que 400 personnes ont tellement aimé quelque chose qu’ils sont prêt à le soutenir financièrement, ce qui est une grosse différence.
Si vous en savez trop sur les gens, la gestion devient un problème. Nous ne voulons pas construire un système où nous connaissons tout sur tout le monde. Quand on utilise Facebook, ils savent tout ce que vous faîtes, nous voulons être un contre-poids à cela. En plus, nous n’avons pas besoin de savoir, donc pourquoi devrions-nous essayer ?
D’abord, on a besoin de devenir très gros en termes de taille. Je veux que les gens soient capables d’en rémunérer d’autres. Un million d’utilisateurs à la fin de cette année (2011) est l’objectif minimal, même si j’espère que le chiffre sera plus proche de 5 millions. Ensuite, je veux introduire un système de paiement direct pour rendre possible l’achat de choses en utilisant Flattr.
L’idée de The Pirate Bay n’a jamais été de dire que les choses ne devaient pas avoir de coût. Il s’agissait de faire en sorte que les gens soient capable de partager de l’information, sans se soucier de ce qui était échangé. Sans censure ni filtre, ainsi nous n’introduisons pas de valeurs éthiques ou de moral dans votre vision du monde. C’est simplement une plateforme, rien de plus. Un moyen de transport pour l’information. Et cela ne devrait rien être d’autre. De la même manière qu’un FAI ne devrait pas décider quel site vous pouvez ou ne pouvez pas accéder.
Un pirate, c’est quoi? La définition vient d’une industrie qui appelle tout ceux qui ne font pas ce qu’elle veut des pirates. Nous avions envie de nous réapproprier ce mot, le rendre cool. Il était plus question de subvertir socialement ce que le mot signifie que de dire: “nous allons voler toutes vos affaires”.
Il est clair que non. Et bien sûr, nous en tirons en quelque sorte partie. Ca nous fait économiser en marketing. Je vais dans des conférence, j’y parle de Flattr et on me paie pour ça. Mais je ne considère pas Flattr comme une entreprise comme les autres. Le but n’est pas de se faire de l’argent, l’objectif est de changer les choses. Ce n’est pas une entreprise “non-profit” stricto sensu, mais je la voie plutôt comme une une façon de financer d’autres projets similaires.
Au début, j’étais engagé dans Piratbyrån (“le bureau piratage”). En Suède, il y avait l’Antipiratbyrån (le bureau anti-piratage) qui était principalement un groupe de lobbyistes d’Hollywood œuvrant en Suède. Donc des artistes, des hackers, tout ceux qui étaient engagés et intéressés par Internet ont lancé Piratbyrån, qui était alors un projet pour rigoler. Au début, il y avait peut-être 40 personnes qui y travaillaient sur de nombreux projets, l’un d’eux étant Pirate Bay. A l’époque, tout le monde utilisait des connexions directes pour le partage de fichiers, ce qui n’était pas terrible d’un point de vue légal et c’était surtout très lent. BitTorrent était largement supérieur et nous voulions nous assurer que les utilisateurs pouvaient comprendre son fonctionnement et qu’il soit en suédois. En fin de compte, il a pris beaucoup d’importance et est devenu un projet indépendant, séparé du reste.
On a commencé par faire pas mal de recherches au niveau légal. Et nous avions l’aide de Mikael Viborg, qui est probablement l’une des personnes les plus talentueuses en Suède dans le domaine de la propriété intellectuelle. Nous avons aussi compris qu’une firme américaine ne peut pas venir et citer des textes de droits étasuniens dans une cour de justice en Suède. Nous leur envoyions des cartes montrant où est la Suède et disant « nous ne sommes pas encore partie intégrante des Etats-Unis ». Nous leur envoyions aussi des photos d’ours polaires qui disaient “Vous avez peut-être des problèmes de droit d’auteur mais ici nous avons des problèmes avec des ours polaires qui essaient de nous manger”. Et les entreprises ne savaient pas quoi répondre.
Je ne pense pas être coupable de quoi que ce soit. Je n’ai rien fait de mal.
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Crédits photo: Flattr
]]>Le principe de Flattr est de promouvoir sur le net une circulation volontaire de micro-paiements, avec des contraintes minimes permettant d’espérer qu’à terme ces dons iront valoriser le travail créatif. Un projet similaire à celui de la Société d’acceptation et de répartition des dons (SARD — http://www.sard-info.org/ ), dont on attend avec impatience la mise en place [1]
Faut-il faire un dessin ? Quel qu’il soit, le travail créatif a parfois bien du mal à se trouver un « modèle économique » sur le Net. C’est tout l’enjeu de Flattr. Et on l’avoue et le savoure sans détour : qu’un début-de-prémices-d’alternative-possible-(on-est-encore-sûr-de-rien) puisse venir du côté des flibustiers scandinaves n’est pas pour nous déplaire. L’imagination au pouvoir vs l’arsenal du pouvoir.
Par travail créatif, Flattr entend textes, musiques, vidéos, sons, logiciels, et « le reste ». La force de Flattr réside aussi là : il ne se cantonne pas à un secteur. Flattr prend en compte nos usages : dans une journée, nous sommes tour à tour lecteur, puis geek, puis mélomane. Dans une journée, on peut saluer le travail de gens bien différents. C’est pourquoi, en fonction des besoins et des secteurs, le tout-gratuit ne peut être la réponse-à-tout et le système du tout-payant la réponse (viable) à rien.
Comme le dit Damien Clauzel (doublement flattré par nos services), l’une des clés du système social de micropaiement proposé par Flattr est que « le mode opératoire doit être le plus simple possible, pour éviter les barrières ; les utilisateurs doivent avoir une vision et un contrôle clairs de leurs finances ».
Cliquer ici pour voir la vidéo.
Ce réseau de microdons marchera, ou pas, selon qu’il convaincra suffisamment de personnes de répartir deux ou trois euros chaque mois en flatteries auprès de leurs musiciens, dessinateurs, blogueurs, écrivains, ou codeurs préférés pour que cela rapporte plus que des clopinettes à certains.
Ça ne va pas être aisé. Un calcul simple : pour tirer un SMIC de Flattr, combien faut-il recevoir de flattries ? En supposant que le participant moyen verse 2 euros par mois et ne flatte qu’une personne par jour, on arrive au résultat de 10 000 flatteurs par mois. Et encore, sans compter qu’à partir d’un certain revenu, il faudra commencer à payer des taxes. Le calcul rejoint la théorie de Kevin Kelly, comme quoi, pour vivre de sa création, il faut à un artiste 1 000 Vrais Fans, le Vrai Fan étant défini comme quelqu’un qui achète systématiquement tout ce que vous produisez. (à lire aussi).
Donc, financièrement, on oublie ; pour 99,99… % des gens, Flattr ne remboursera jamais le temps passé à créer des « things » sur Flattr — ni même à installer Flattr. Tant que la contribution se décide sur une base volontaire, les sommes mises en œuvre ne peuvent qu’être dérisoires (à part peut-être pour Peter Sunde et ses copains, dans le rôle de la banque centrale). Parions toutefois que le système fera émerger trois ou quatre stars dont tout le monde parlera avec envie. Sur son blog, Flattr évoque de « nombreux utilisateurs » qui ont déjà perçu 100 € et des « centaines » qui ont touché une « certaine somme » (sachant que 10€ est le minimum pour percevoir des dons) mais, convenons-un, les chiffres avancés restent modestes.
On est loin de la contribution créative théorisée par Philippe Aigrain. Cette contribution qui, en étant obligatoire, lèverait immédiatement beaucoup d’argent (« de 1,2 à 1,7 milliard d’euros par an »), permettrait de remplir (un peu) les poches de (beaucoup) d’artistes et de créateurs, plutôt que de faire rouler des euros dans la besace des fournisseurs d’accès ou des sociétés de flicage, comme le font Hadopi et son pare-feu Open-Office.
Autre critique, plus idéologique : le système alimente les kurbettes, c’est-à-dire une déférence devant la créativité, en reposant sur le mythe de l’Auteur seul face à son œuvre. Un mythe nuisible dans bien des secteurs de la créativité où il n’a tout simplement pas de sens, comme par exemple dans le logiciel libre — mais pas seulement. Les deux auteurs de cet article ne sont d’ailleurs pas entièrement d’accord sur ce point (c’est la beauté des textes écrits à quatre mains). Car tout dépend du champ de la création. Parfois exercice solitaire, parfois fusion commune des esprits, etc. Mais le propos, ici, est bien celui-ci : comment fait-on pour s’en sortir un peu à l’heure du numérique, où chacun perçoit que les notions d’auteur, de diffuseur, d’éditeur, et même le travail des marchands a basculé.
Quoi qu’on en pense, Flattr peut être amusant. Si on le considère non pas comme une source de revenus (dans tes rêves), mais comme une nouvelle expérience de monnaie alternative, à l’image du whuffie de Cory Doctorow. Quand on est content d’avoir lu un truc ou écouté un machin, on envoit un feedback ; ça existait déjà sous la forme d’un commentaire sur le forum, ou d’un « j’aime » ; on peut maintenant soutenir pécunièrement avec une flattrie. Le compte de la personne flattrée s’enrichit de quelques centimes, qu’elle utilisera à son tour pour flattrer d’autres personnes. Le whuffie circule ainsi, interactivité à deux balles comme les « poke » de Facebook ou les « kudos » de feu Ohloh, mais interactivité tout de même.
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Billet originellement publié sur le blog de Davduf sous le titre “Flattr-ies et Kurbettes“.
Crédit Photo CC Flickr : Samfoxphotography.
]]> Sécurité : le code de paiement n’est utilisable qu’une seule fois et ne peut être subtilisé, aucun risque de fraude.
Pratique : aucune pré-inscription n’est nécessaire.
Facilité : Un seul code à saisir.
Rapidité : La plupart des transactions sont effectuées en moins d’une minute.
Fiabilité : L’utilisateur garde son anonymat et ne donne pas ses informations personnelles au site marchand.
Maîtrise du budget : dans le cadre d’un paiement via Audiotel ou SMS
Pour en savoir plus, je mets à disposition cet article paru dans 01NETPRO.
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]]>Dans un monde de flux où les biens s’écoulent, l’ancienne économie de la rareté de l’offre associée à la rareté de l’argent ne peut plus survivre. Sans doute faudra-t-il basculer vers un système financier où chacun pourra émettre de la monnaie et devenir banque centrale. Mais avant d’envisager cette entrée dans le flux de la finance, je voudrais inventorier les différentes modalités de rétribution adaptées aux flux, certaines incompatibles, d’autres complémentaires.
En résumé, nous entrevoyons aujourd’hui trois formes de rémunération qui pourraient se compléter pour remplacer le modèle actuel du prix de vente.
Est-ce ainsi que nous sortirons du monde de la rareté, du monde des happy few, et entrerons dans le monde des flux ? Sans doute que nous n’avons pas encore eu les bonnes idées.
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Un article initialement publié sur Le peuple des connecteurs
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