[MAJ]Les bikinis rembourrés pour fillettes font scandale aux USA

Le 28 mars 2011

Aux États-Unis, blogueurs, parents, psychologues et médias dénoncent la mise en vente de bikinis "push-up" pour fillettes, pointant du doigt l'irresponsabilité des mamans qui les achètent.

Notre article sur les soutiens-gorge rembourrés que l’on trouve dans les supermarchés, à l’intention des petites filles de 8 à 10 ans, a suscité de très nombreuses réactions, notamment sur les blogs et Facebook, où l’article a été partagé par plus de 2500 personnes.

MaJ du 29 mars : les bikinis rembourrés ont été retirés de la vente… mais un fabricant de jouet chrétien vient de sortir une poupée que les petites filles sont invitées à allaiter au sein, et une esthéticienne britannique a décidé d’injecter du Botox à sa fille… de 8 ans (voir plus bas).

La presse, notamment féminine, que nous avions contactée à la publication de notre article, reste par contre étrangement silencieuse sur cette incongruité, qui fait que la majeure partie des soutiens-gorge vendus en grande surface et destinés aux petites filles de 8 à 10 ans sont rembourrés de mousse, ou dotés de coque, afin de donner du volume aux petites poitrines…

De l’autre côté de l’Atlantique, il a suffit qu’un blog remarque la mise en vente sur un site internet de trois soutiens-gorges rembourrés pour déclencher une petite tempête médiatique…

“Un nouvel exemple de la sexualisation des petites filles”

Le 19 mars dernier, Lisa Wade, professeur de sociologie et spécialiste des questions de genre et de sexualité, s’étonnait sur son blog de découvrir “un nouvel exemple de la sexualisation des petites filles, sous la forme de bikinis “push up, et donc rembourrés, dans la nouvelle collection de la marque Abercrombie Kids, à destination de filles de 8 à 14 ans, dont le modèle S a été conçu pour les tours de poitrine de 70-72 cm, ce qui correspond généralement à des filles de 10 ans.

Lisa Wade avait déjà, à de nombreuses reprises, critiqué ce genre d’érotisation des petits filles, à l’occasion du n° de décembre du magazine Vogue, et plus particulièrement de son supplément cadeau, qui mettait en scène des petites filles de 6 ans habillées et maquillées comme des “dames” de luxe :

Dernièrement, elle avait également relayé la vidéo d’une petite fille de 2 ans qui, à l’initiative de sa maman, avait présenté à un concours de beauté pour enfants une chorégraphie inspirée de la tournée de Madonna où, retirant son costume d’ange, on la découvrait habillée avec le fameux bustier pointu :

Une semaine et plus d’une centaine de billets de blog plus tard, émanant notamment de parents indignés, la presse commence elle aussi à s’en faire l’écho, aux États-Unis. Good Morning America, le célèbre programme matinal d’ABC News, rappelle que les “tweens” [de "between" et "teen", signifiant préadolescent, NDLR] dépensent près de 24 millions de dollars, chaque année, en produits de beauté de type gloss, mascara, fards à paupière, et que des chaînes comme Wal Mart avaient même lancé des lignes de maquillage spécial petites filles.

ABC évoque également la reprise, par des petites filles de 7 ans, de la chorégraphie très sexy de Single ladies, le tube de Beyoncé, en 2010 au festival World of Dance :

Interrogé par ABC, Michael Bradley, auteur d’un livre sur les difficultés que rencontrent les parents avec leurs adolescents, raconte avoir d’abord pensé à une blague quand il a entendu parler de ces bikinis rembourrés, tout en reconnaissant que certaines marques n’hésitent pas à sexualiser les enfants dès l’âge de 4 ans.

Pour lui, ce genre de marketing ne peut que nuire aux petites filles, que l’on pousse trop tôt vers la sexualité, tout en leur expliquant que leur corps ne suffit pas, qu’il leur faut rembourrer leurs seins…

Interrogée par CNN, Gail Dines, un professeur de sociologie, note pour sa part que c’est non seulement dangereux parce que les petites filles commencent elles-mêmes à se penser comme objets sexuels, mais également parce que cela revient à laisser entendre aux hommes que les filles qui portent ces bikinis sont déjà des objets sexuels susceptibles d’être désirées, alors même qu’elles ne sont pas encore prêtes à vivre leur sexualité :

Sur FoxNews, le Dr Janet Rose estime pour sa part que les parents qui achètent ce genre de sous-vêtements à leurs enfants devraient être dénoncés aux services sociaux, parce que cela les pousse, précocement, vers la sexualité, et qu’à long terme, cela ne peut qu’entraîner les adolescentes à avoir une bien mauvaise image d’elles-mêmes.

Patrick Wanis, “expert du comportement humain” (sic) et coach de nombreuses célébrités, estime pour sa part que ces soutiens-gorges rembourrés sont non seulement dérangeants, mais également dangereux :

Sommes-nous en train de sexualiser les petites filles afin d’attirer l’attention des hommes, ou pour encourager les femmes à utiliser leurs filles, et se projeter à travers elles, pour compenser leur propre manque de sex-appeal ?

Pour Shirlee Smith, défenseure des enfants et animatrice d’une émission sur la parentalité, le problème n’est pas tant celui d’une industrie qui va jusqu’à proposer ce genre de produits que celui des mamans qui n’hésitent pas les acheter :

J’en veux à ces mères qui ne voient pas plus loin que le bout de leurs implants mammaires lorsqu’il s’agit d’acheter des soutiens-gorges rembourrés pour des filles qui n’ont même pas encore de seins.

Aujourd’hui, ce sont les mères qui paient ce genre de marketing de l’érotisation des enfants. A terme, ce seront leurs objets sexuels de filles qui le paieront.

Abercrombie Kids, qui avait déjà du retiré, il y a quelques années, des strings en taille 10 ans intitulés “clin d’oeil” et “bonbon pour les yeux” (sic), a refusé de répondre aux questions des journalistes, se contentant d’effacer sa page consacrée aux push ups.

Mais si la rubrique “push-ups” a été effacée, les trois soutiens-gorges rembourrés, par contre, sont toujours en vente.

MaJ du 29 mars : confronté à une couverture médiatique internationale, Abercrombie Kids annonce sur Facebook avoir “re-catégorisé” les 3 soutiens-gorges push-ups, qui ne sont plus disponibles à la rubrique maillots de bain de son site web.

Dans le même temps, Berjuan Toys, un fabricant de jouets vient de son côté de sortir une poupée spécialement créée pour que les petites filles puissent l’allaiter. Elles devront pour cela revêtir une sorte de soutien-gorge avec des fleurs à la place des tétons, avant de coller la bouche de leur poupée à ces autocollants afin que celle-ci puisse “téter et avaler” :

The Breast Milk Baby permet aux jeunes filles d’exprimer leur amour et leur affection de la manière la plus naturelle possible, juste comme leur maman. Cette poupée représente une révolution parce qu’elle apprend aux fillettes les compétences nourricières dont elles auront besoin pour un jour élever leurs propres bébés en bonne santé.

Découvrant que 20% des internautes se déclaraient choqués par cette initiative, le fabricant se défend aujourd’hui en expliquant que… Dieu les soutient :

On nous qualifie de pervers et de pédophiles parce que nous faisons la promotion de la façon dont Dieu veut que nos bébés soient nourris. Les églises du monde entier sont truffées d’images de Marie allaitant Jésus.

Après avoir joué à la “putain“, voici donc les petites filles invitées à jouer à la maman en nourrissant leur poupée avec de (faux) seins… se désole Crêpe Georgette, très énervée, dans un billet intitulé Allaite et tais-toi, où elle propose également à la société Berjuan Toys de créer également :

1. le téton crevassé (tant qu’à faire)
2. le poupon pénis (tant qu’à initier la femme à ses futurs rôles, autant l’initier à tous).

En Grande-Bretagne, une esthéticienne a de son côté décidé d’injecter du Botox à sa fille… de 8 ans, tous les trois mois. Ses explications démontrent là aussi une troublante confusion des genres entre la réalité de ce que vivent les enfants et les fantasmes que peuvent avoir leurs parents :

Ce que je fais pour Britney maintenant l’aidera à devenir une star. Je sais qu’un jour elle sera un top model, une actrice ou une chanteuse, et en lui faisant ces traitements maintenant je m’assure qu’elle aura l’air jeune et qu’elle gardera un visage de bébé plus longtemps.

La réaction de la petite fille est tout aussi effarante :

Je vérifie tous les soirs si je n’ai pas de petites rides, et si j’en ai je redemande plus d’injections. Avant ça faisait mal mais maintenant je ne pleure plus tellement. Je veux aussi une opération des seins et du nez bientôt, pour devenir une star.

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