Bayrou l’homme du passé

Marine Le Pen s'enfonce, Jean-Luc Mélenchon jubile. Parallèle fortuit avec les derniers sondages en date, le candidat du Front de gauche semble plus en forme que jamais dans le classement de la crédibilité des candidats mesurée par Le Véritomètre d'OWNI-i>TÉLÉ, tandis que Marine Le Pen peine à marquer des points.

Un discours, et trois points de plus au classement général du Véritomètre, permettant de vérifier l’exactitude de toutes les déclarations chiffrées ou chiffrables des six principaux candidats à l’élection présidentielle. Jean-Luc Mélenchon est en pleine forme. Le candidat du Front de gauche poursuit son ascension dans la tête du classement, distançant d’autant plus François Hollande qui tombe de 57,4 à 54%, tout près de François Bayrou (53,4%). Au bas de l’échelle, rien ne va plus pour Marine Le Pen, qui s’enfonce à 41,6% de crédibilité suite à son intervention sur France Info le 22 mars dernier.

Au cours des 72 dernières heures, l’équipe du Véritomètre a vérifié 25 citations chiffrées des candidats à la présidentielle1.

Condensé des faits chiffrés qui ont retenu notre attention aujourd’hui.

François Bayrou solide en Histoire

De tous les chiffres lancés chaque jour par les candidats à l’élection présidentielle et vérifiés par l’équipe du Véritomètre, rares sont ceux qui concernent la période de la Quatrième République. François Bayrou a fait une exception à la règle lors d’un meeting à Nancy, le 21 mars dernier, en remontant aux années 1957 – 1958 sur l’un de ses thèmes préférés, la dette :

En 1957 – 1958 (…) notre pays est surendetté.

D’après un rapport quarantenaire [PDF] du groupe de travail pour la comparaison des budgets de l’ancienne Commission des Communautés européennes, la France a effectivement connu un endettement record durant ces deux années. Le solde des administrations publiques françaises s’est affiché respectivement à -9,912 et -5,803 milliards de francs en 1957 et 1958, une situation unique pour l’époque.

Une époque de “records” qu’affectionne décidément François Bayrou. Au cours du même meeting de Nancy, le candidat MoDem s’y réfère à nouveau pour parler de son autre cheval de bataille, la production industrielle sur le sol français :

Dans ces années, 1957 – 1958, la France connaît un déficit de son commerce extérieur sans précédent.

Correct, selon un rapport [PDF] de la Communauté économique européenne (CEE) – ancêtre de l’Union européenne – daté de septembre 1958, qui indiquait que “le déficit des échanges avec l’étranger reste important et a même marqué depuis la fin de l’année 1957 une tendance à s’accroître”. De sorte qu’en 1958, la France a importé pour 30% de plus qu’elle n’a exporté, un niveau digne de l’immédiat après-guerre. Réchauffé, le “produire en France” ?

Jean-Luc Mélenchon creuse l’écart

Dans la foulée du rassemblement du Front de Gauche à la Bastille, dimanche 18 mars, Jean Luc Mélenchon était l’invité d’Olivier Mazerolles sur BFM TV où il a annoncé :

Lorsque François Mitterrand était candidat en 1981, au premier tour, il était trois points derrière Valéry Giscard d’Estaing, 28 pour Giscard, 25 pour Mitterrand.

Une déclaration qu’il avait d’ailleurs déjà prononcée lors d’un discours à Clermont Ferrand, le 14 mars dernier.

En charge d’enregistrer les résultats officiels des élections, le Conseil constitutionnel indique qu’au premier tour de l’élection présidentielle de 1981, François Mitterrand a obtenu 25,9% des suffrages contre 28,3% pour Valéry Giscard d’Estaing, soit 2,4 points d’avance pour le Président sortant. Le candidat du Front de gauche exagère donc de 20% l’écart entre les deux prétendants à l’Élysée. Soit tout de même 174 229 voix.

François Hollande surtaxe (encore) le pétrole

François Hollande se perd à nouveau sur la taxation des produits pétroliers. Après avoir, à plusieurs reprises, répété que “60% du prix des carburants ce sont des taxes” - la réalité s’établissant plutôt à 50,1% comme nous l’avions montré -, le candidat socialiste se trompe cette fois-ci sur les recettes fiscales issues de la Taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP).

Il a ainsi déclaré, dans l’émission Des Paroles et des Actes diffusée sur France 2 le 15 mars dernier&nsdp;:

La TIPP c’est 26 milliards [d'euros].

Dans le Projet de loi de finances pour 2012, le ministère du Budget mentionne que la TIPP a rapporté 14 milliards d’euros à l’État en 2011. A moins d’avoir voulu pronostiquer une explosion de la consommation de carburants pour l’année 2012, François Hollande gonfle les recettes fiscales issues de la taxe pétrolière de 85,7%, si l’on se base sur les dernières données officielles.


Les vérifications des interventions sont réalisées par l’équipe du Véritomètre : Sylvain Lapoix, Nicolas Patte, Pierre Leibovici, Grégoire Normand et Marie Coussin.
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Illustrations par l’équipe design d’Owni /-)

  1. L’équipe du Véritomètre a fixé des seuils de tolérance pour l’évaluation des chiffres des candidats : si la marge d’erreur entre le chiffre évoqué par le candidat et la donnée officielle disponible est comprise entre 0 et 5 %, nous considérons la citation comme “correcte” ; si la marge est entre 5 et 10 % on la qualifiera d’”imprécise”, enfin si la marge est de plus de 10% nous l’évaluerons comme “incorrecte” []

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